Une situation sécuritaire fondamentalement transformée
Depuis l’attaque russe contre l’Ukraine, l’Europe traverse sa plus grave crise sécuritaire depuis des décennies. Or, la Suisse a durci ses règles d’exportation à une époque où une guerre d’agression en Europe semblait improbable. Aujourd’hui, il apparaît clairement que ces restrictions bloquent, en cas de conflit, la transmission de composants suisses entre États partenaires.
C’est pourquoi des pays clés – comme l’Allemagne, le Danemark, les Pays-Bas, la France ou le Royaume-Uni – ne se procurent plus de matériel de défense suisse. Les conséquences sont lourdes : les entreprises suisses sortent des chaînes d’approvisionnement internationales, des projets de recherche multinationaux et des programmes européens de sécurité. Cela affaiblit non seulement la place technologique suisse, mais aussi la sécurité d’approvisionnement de l’armée suisse.
Pourquoi les critiques du PS sont infondées
Plusieurs affirmations contenues dans les récents communiqués du PS sont factuellement incorrectes. L’idée selon laquelle la révision ouvrirait la voie à des exportations vers des pays en guerre civile ou à graves violations des droits humains ne résiste pas à une analyse juridique.
Les faits sont clairs :
- Les exportations vers des États tels que la Russie ou le Soudan restent strictement interdites.
- La Suisse exporte uniquement vers des pays partenaires stables, conformément à l’annexe 2 de l’Ordonnance sur le matériel de guerre.
- Le Conseil fédéral conserve son droit de veto pour des raisons de politique extérieure, sécuritaire ou de neutralité.
Les principes juridiques fondamentaux des règles d’exportation suisses demeurent inchangés.
Conséquences de la législation actuelle : affaiblissement du site industriel et perte de sécurité
Les représentants de l’industrie ont montré de manière très concrète les effets déjà observés de la loi actuelle :
- Les PME perdent des mandats et sortent des chaînes d’approvisionnement internationales.
- Des start-up comme CDDS (systèmes anti-drones), pourtant compétitives au niveau mondial, envisagent une délocalisation.
- Valeur ajoutée, emplois qualifiés et compétences technologiques risquent de disparaître – jusqu’à la perte de propriété intellectuelle.
- Les programmes européens comme SAFE, axés sur les achats conjoints et l’interopérabilité, deviennent inaccessibles aux entreprises suisses.
Conclusion essentielle : sans industrie de défense performante, il n’y a pas de sécurité d’approvisionnement pour l’armée suisse.
Ce que la révision de la LFMG change réellement
Le Conseil des États et la Commission de la politique de sécurité du Conseil national (CPS-N) proposent deux ajustements précis :
- Les pays partenaires (annexe 2 OMaG), dotés d’institutions solides et d’obligations d’exportation équivalentes, pourront être approvisionnés même en cas de conflit.
- Le contrôle de l’utilisation finale est anticipé : l’évaluation de la possibilité d’un transfert ultérieur se fera au moment de l’exportation, et non plusieurs années plus tard. Cela renforce la sécurité juridique et la prévisibilité.
Ces corrections sont indispensables pour restaurer la fiabilité de la Suisse – comme fournisseur et comme partenaire dans les structures de sécurité européennes – sans affaiblir la protection des droits humains ou la neutralité armée.
Session d’hiver : un choix stratégique pour la sécurité de la Suisse
La CPS-N a terminé ses travaux ; le dossier est prêt pour le Conseil national. La session d’hiver offre l’occasion de moderniser enfin les règles d’exportation et d’assurer une planification fiable pour l’industrie, l’armée et les partenaires internationaux.
Si la révision est adoptée, la Suisse pourra renforcer sa position dans les réseaux de sécurité européens – avec des règles claires qui protègent les droits humains, préservent la neutralité et garantissent la souveraineté technologique.
Swissmem accompagnera activement la session
Swissmem suivra attentivement les débats parlementaires et mettra en avant des analyses factuelles, axées sur :
- la sécurité d’approvisionnement de la Suisse,
- la préservation des compétences industrielles clés,
- la protection des emplois et du savoir-faire technologique,
- la fiabilité internationale de la Suisse,
- le respect de la neutralité armée.
