Page d’accueil Approches de solution pour soutenir les entreprises grandes consommatrices d’énergie
Interlocuteur Dr. Jean-Philippe KohlDr. Jean-Philippe Kohl
Chef de la division « Politique économique » / Directeur adjoint
+41 44 384 48 15 +41 44 384 48 15 j.kohlnoSpam@swissmem.ch
Partager

Approches de solution pour soutenir les entreprises grandes consommatrices d’énergie

Les entreprises à forte consommation d’énergie en Suisse sont confrontées à des désavantages en matière de concurrence qui menacent parfois leur existence en raison des subventions massives des prix de l'énergie accordées par différents États de l’UE. Raison pour laquelle la Suisse risque de perdre de manière involontaire de la substance industrielle dans de grandes proportions. Les entreprises à forte consommation d’énergie ont besoin d’un soutien ciblé. Il existe un certain potentiel au niveau des taxes d’utilisation du réseau. Ce sont avant tout les cantons qui en ont la responsabilité. En tant que propriétaires des entreprises à forte consommation d’énergie, ils peuvent à moyen terme s’attendre à des recettes de dividendes bien plus élevées vu la situation actuelle. C'est dans leur propre intérêt de soutenir les entreprises menacées sur leur territoire en prenant les mesures nécessaires.

La guerre en Ukraine a fait exploser les prix. Entre-temps, ils sont certes nettement redescendus, mais sont toutefois bien au-dessus des prix des cinq dernières années et nettement plus élevés que dans de nombreux pays asiatiques et qu’aux USA. En outre, il règne une grande insécurité du fait de la guerre en ce qui concerne l’évolution des prix en Europe. Les entreprises à forte consommation d’énergie sont toujours moins concurrentielles.  Dans ce contexte, divers États de l’UE soutiennent ces entreprises par des subventions massives en baissant artificiellement les prix de l’énergie de diverses manières.

Les entreprises suisses à forte consommation d'énergie réalisent souvent une part importante de leur chiffre d’affaires dans l’UE, sont en concurrence avec les importations en provenance de l’UE ou se trouvent même dans une situation de concurrence globale entre les sites. Étant donné que la Suisse ne connaît pas de mesures analogues en matière de politique industrielle telles que dans l’UE, ces entreprises en Suisse doivent faire face à des désavantages concurrentiels massifs.  Certaines entreprises ne reçoivent déjà plus de commandes à cause du désavantage au niveau des coûts énergétiques. Pour d’autres entreprises, les investissements dans le site de production local tombent. Ces entreprises rencontrent actuellement des difficultés existentielles. La place industrielle suisse est remise en question. 

Les désavantages pour la Suisse ne se limitent pas seulement à la perte éventuelle d’emplois.  Le rôle central des diverses entreprises pour les chaînes de production et de fourniture en Suisse est bien plus important. Les aciéries par exemple transforment toute la ferraille en acier. Sans ces aciéries, la ferraille devrait être transportée à l’étranger et réimportée sous forme de nouveaux produits, ce qui s’avérerait plus coûteux et moins respectueux de l’environnement. La Suisse serait dépendante de l’étranger pour l’acier de construction et industriel. Des raisons similaires peuvent être invoquées par de nombreuses entreprises à forte consommation d’énergie.

Même si les expériences faites au cours de l’histoire montrent que les mesures prises en politique industrielle ne font à moyen et long terme rien bouger, la question se pose quand même pour la Suisse de savoir comment elle doit réagir face à ces distorsions de concurrence. La Suisse risque de perdre de manière involontaire de la substance industrielle dans de grandes proportions avec des conséquences néfastes au niveau du cycle des matières premières. C’est pourquoi il faut évaluer rapidement et soigneusement quelles mesures étatiques sont adéquates pour parer aux répercussions négatives de la politique de l’UE sur les entreprises concernées en Suisse.

Utiliser la marge de manœuvre de l’État

Dans la recherche de solutions, la priorité est donnée à l’amélioration des conditions-cadres  :

  • Il peut être également recouru au chômage partiel pour faire face aux baisses de la demande qui résultent de distorsions de prix à l’étranger dues à la politique industrielle.
     Même si cet outil ne permet pas de résoudre l’ensemble du problème, c’est une contribution bienvenue pour soutenir les entreprises concernées.
     
  • Les tarifs pour le réseau de transport augmenteront à partir de 2024 d’environ 1,8 ct./kWh.  Y sont compris 1,2 ct./kWh pour les coûts de la Confédération qui résultent de la création d’une réserve d’électricité pour le cas d’une pénurie d’électricité. Pour les entreprises dont la consommation d’électricité dépasse 100 GWh par année, ces augmentations de tarifs entraînent des coûts supplémentaires à hauteur de millions qui ne peuvent pas être répercutés sur les clients. Ce qui est choquant, c’est que les entreprises à forte consommation d’énergie doivent également payer ces taxes, alors qu’elles ne profiteraient pas de la réserve d'électricité si celle-ci était activée. L’expérience montre qu’avant une pénurie d’électricité, le niveau des prix de l’électricité augmente tellement que les entreprises ne peuvent plus produire de manière rentable et donc réduisent leur production - et de ce fait la consommation d’électricité. Par conséquence, la réserve d’électricité serait plus petite ce qui diminuerait les coûts de la réserve pour tous les consommateurs. 

    Pour créer une réserve d’électricité avec la réserve d’eau et les centrales de réserve, la Confédération a jusqu’ici tout misé sur les mesures coûteuses des producteurs d’électricité.  Avec un délestage, les gros consommateurs d’énergie peuvent toutefois aussi apporter une contribution préventive déterminante pour éviter une pénurie. Comme pour la réserve d’eau, les entreprises à forte consommation d’énergie devraient pouvoir s’engager suffisamment tôt à réduire leur consommation d’électricité de manière substantielle en cas de pénurie d’électricité grave.  Comme ces entreprises limitent leur consommation en cas de pénurie, elles se comportent en fait comme un fournisseur d’électricité de réserve. Raison pour laquelle elles doivent être dispensées des coûts du réseau de transport liés à la réserve d’électricité.
     
  • Il faudra aussi d’autres mesures pour soutenir le nombre limité d’entreprises à forte consommation d’énergie. Elles ne doivent pas être les victimes involontaires des distorsions de la politique industrielle de différents États membres de l’UE. La responsabilité de trouver une solution pour ces entreprises incombe en premier lieu à la Confédération avec les cantons concernés. En particulier, les cantons sont aussi les lieux d’implantation des entreprises menacées. En tant que propriétaires des entreprises d’électricité, les cantons devraient s’attendre à moyen terme à des recettes de dividende considérablement élevées. De ce fait, il serait d’un point de vue politique incompréhensible qu’ils profitent de bénéfices élevés du fait de la hausse des prix de l’électricité et qu’en même temps, ils ne viennent pas en aide aux entreprises à forte consommation d’énergie qui rencontrent des difficultés existentielles sur leur territoire. 

Une approche de solution envisageable serait que les cantons demandent à leurs entreprises d’électricité d’approvisionner les entreprises sous pression au prix de revient (plus une marge de bénéfice normale) tout en respectant certaines conditions et durant une période limitée.

Au final, la responsabilité revient aux cantons aussi dans leur propre intérêt.  Les entreprises à forte consommation d’énergie offrent des places de travail et génèrent directement et indirectement des recettes fiscales. Elles devraient mettre leur marge de manœuvre à profit pour conserver des conditions adéquates pour les entreprises à forte consommation d’énergie.  

Cet article, vaut-il la peine d'être lu ?

Ces articles peuvent vous intéresser

Dernière mise à jour: 22.05.2023