Ă quoi il faut veiller en gĂ©nĂ©ral lors dâun congĂ© en raison de lâĂąge
Selon la jurisprudence du Tribunal fĂ©dĂ©ral, lâemployeur est soumis Ă un devoir de prĂ©venance accru lors du congĂ© de travailleurs dâun certain Ăąge â surtout en combinaison avec un nombre Ă©levĂ© dâannĂ©es de service. Cela signifie quâil faut informer et entendre le travailleur avant le congĂ© sur lâintention de licencier et discuter avec lui des possibilitĂ©s de poursuivre les rapports de travail (« accorder une derniĂšre chance »). Lâemployeur doit en particulier montrer au travailleur quâil nâest pas dâaccord avec sa prestation et son comportement et que, sauf amĂ©lioration, un congĂ© le menace.
Lâemployeur a ainsi le devoir dâexaminer au prĂ©alable si les rapports de travail pourraient se poursuivre le cas Ă©chĂ©ant sous une forme adaptĂ©e concernant les tĂąches, le niveau de responsabilitĂ©, le pensum, la division, etc. et dâen dĂ©battre avec lâemployeur. Sinon existe le danger que le congĂ© puisse ĂȘtre attaquĂ© en tant quâabusif.
La notion de « travailleurs dâun certain Ăąge » nâest pas dĂ©finie par la loi. On peut cependant dĂ©duire de la jurisprudence et de la doctrine une limite infĂ©rieure dâenviron 53 Ă 55 ans, en tenant cependant toujours compte du cas particulier et du nombre dâannĂ©es de service.
CongĂ© en raison de lâĂąge pour cause de maladie
Dans ce rĂ©cent cas de congĂ© pour raison dâĂąge, le Tribunal fĂ©dĂ©ral a dĂ» examiner le cas dâune travailleuse malade licenciĂ©e Ă lâĂ©chĂ©ance du dĂ©lai de protection de six mois et aprĂšs quatorze annĂ©es de service (arrĂȘt du Tribunal fĂ©dĂ©ral 4A_390/2021 du 1er fĂ©vrier 2022). Au moment du congĂ©, la travailleuse Ă©tait ĂągĂ©e de 63 ans et en incapacitĂ© de travail Ă 100 % depuis six mois, lâincapacitĂ© de travail ayant encore durĂ© cinq mois aprĂšs le congĂ©. La travailleuse nâa retrouvĂ© la pleine capacitĂ© de travail que quatorze mois aprĂšs le dĂ©but de lâincapacitĂ© de travail.
La plaignante a fait valoir que son licenciement Ă©tait abusif en raison de son Ăąge et du fait quâil avait Ă©tĂ© prononcĂ© dix mois avant quâelle atteigne lâĂąge ordinaire de la retraite. Elle invoqua notamment en lâoccurrence lâarrĂȘt du Tribunal fĂ©dĂ©ral dans la cause dâun monteur de 63 ans et 44 annĂ©es de service licenciĂ© Ă©galement peu de mois avant dâatteindre lâĂąge de la retraite et dont le Tribunal fĂ©dĂ©ral avait qualifiĂ© le congĂ© dâabusif parce que lâemployeuse avait nĂ©gligĂ© de trouver une solution au conflit avec le travailleur au sens dâune mesure socialement supportable (ATF 132 III 115).
Dans le cas prĂ©sent, le Tribunal fĂ©dĂ©ral Ă©tait dâun autre avis. En rĂ©sumĂ©, il a considĂ©rĂ© quâil est admissible de licencier quelquâun Ă lâĂ©chĂ©ance du dĂ©lai de protection contre le congĂ© en raison dâune maladie nuisant Ă la prestation de travail. En lâespĂšce, le genre dâemploi de la travailleuse aurait rendu nĂ©cessaire une rĂ©organisation. Par ailleurs, ce nâest pas le rapport de la plaignante avec dâautres employĂ©s de lâemployeuse ou sa prestation de travail considĂ©rĂ©e comme insuffisante qui avait Ă©tĂ© la raison de son licenciement (comme dans les arrĂȘts du Tribunal fĂ©dĂ©ral citĂ©s par la plaignante), mais le fait que la plaignante nâavait plus pu exĂ©cuter son travail Ă cause de sa maladie. La travailleuse nâavait de plus pas pu donner dâindication sur le moment auquel elle reviendrait Ă sa place de travail aprĂšs plus de six mois dâabsence pour cause de maladie. Bien que la plaignante nâait plus Ă©tĂ© quâĂ dix mois de lâĂąge lĂ©gal de la retraite et que le congĂ© aurait eu pour consĂ©quence une aggravation des prestations de la caisse de pension, le congĂ© nâa ainsi pas Ă©tĂ© abusif. Lâemployeuse nâavait notamment pas Ă©tĂ© obligĂ©e de garder libre la place de la plaignante pendant prĂšs dâune annĂ©e seulement pour empĂȘcher les effets nĂ©gatifs sur les prestations de la caisse de pension, dâautant plus que lâemployeuse nâavait pas eu la moindre information sur une Ă©ventuelle reprise de son travail par la plaignante (arrĂȘt du Tribunal fĂ©dĂ©ral 4A_390/2021 du 1er fĂ©vrier 2022, cons. 3.3.2. Ă 3.4.2.). Le Tribunal fĂ©dĂ©ral a rejetĂ© le recours pour ces raisons.
Conclusion
Le fait quâun travailleur, au moment du congĂ©, ait un certain Ăąge et soit peu de mois avant la retraite ne signifie pas Ă lui seul que le congĂ© est abusif. Dans le cas dâun congĂ© dit pour raison dâĂąge aussi, le cas particulier et les circonstances concrĂštes jouent toujours un rĂŽle.
Il est certain cependant que, pour des congĂ©s de travailleurs dâun certain Ăąge, et surtout pour ceux qui ont de nombreuses annĂ©es de service, il faut toujours observer un devoir de prĂ©venance Ă©levĂ©.
Pour toute question Eva Bruhin, suppléante de la cheffe de la division Politique patronale (e.bruhinnoSpam@swissmem.ch), se tient volontiers à la disposition des entreprises membres de Swissmem.